Tout comprendre sur le pH : Quel impact sur l’eau de votre robinet ?

Qu’est-ce que le pH et pourquoi en parler pour l’eau domestique ?

Le terme pH est devenu familier grâce à de nombreux produits ménagers ou cosmétiques, mais son influence dans l’eau que nous consommons et utilisons quotidiennement reste souvent mystérieuse. Derrière ce petit sigle se cache un paramètre central pour la qualité de l’eau du robinet. Comprendre le pH, c’est mieux maîtriser l’impact de l’eau sur votre santé, votre confort, et la durabilité de vos équipements.

Le pH, abréviation de « potentiel hydrogène », indique l’acidité ou la basicité (alcalinité) d’une solution. La mesure va de 0 à 14 :

  • pH 7 : neutre (exemple : eau pure distillée)
  • pH < 7 : acide (exemple : jus de citron ~pH 2–3)
  • pH > 7 : basique ou alcalin (exemple : eau de Javel ~pH 12)
En France, l’eau du robinet a généralement un pH compris entre 6,5 et 8,5, conformément à la réglementation (Arrêté du 11 janvier 2007, Ministère de la Santé).

Le pH de l’eau du robinet en France : des chiffres et des explications

Les distributeurs d’eau potable surveillent de près le pH avant la distribution. Voici ce qu'il faut savoir :

  • La réglementation impose un pH entre 6,5 et 9 à la sortie de l’usine, mais la majorité des réseaux fournissent une eau entre 7 et 8,5 (Source : Santé Publique France).
  • Différences régionales : Dans certaines régions calcaires (Nord, Est, bassin parisien), le pH est souvent plus élevé car l’eau traverse des sols riches en carbonate de calcium. À l’inverse, en zone de granite (Massif Central, Bretagne), il tend à être plus bas, parfois proche de 6,5.
Contrairement à une croyance répandue, un pH plus élevé ne justifie pas toujours le recours à des adoucisseurs ou à des corrections. Mieux vaut comprendre ce que signifie un pH « trop bas » ou « trop haut » avant d’agir.

Pourquoi le pH influe-t-il sur la qualité de votre eau ?

Le pH a un impact direct ou indirect sur plusieurs aspects essentiels :

  • Le goût de l’eau : Une eau trop acide ou trop alcaline peut avoir un goût métallique ou amer. Un pH neutre est souvent le plus agréable au palais.
  • La stabilité des équipements domestiques : Le pH joue un rôle clé dans la corrosion des canalisations, les dépôts de calcaire, la durée de vie du chauffe-eau et des appareils électroménagers.
  • La sécurité sanitaire : Un déséquilibre de pH peut favoriser la migration de métaux toxiques (plomb, cuivre) ou le développement de micro-organismes indésirables.

Le pH et ses effets sur les installations de la maison

Sur la tuyauterie :

  • pH trop bas (acide) : Risque de corrosion des canalisations en cuivre, fonte ou plomb. Résultat : pertes en eau, taches verdâtres, relargage de métaux lourds (plomb, cuivre, zinc) dans l’eau courante. Même à basse concentration, le plomb et le cuivre sont strictement surveillés pour leur toxicité (source : Organisation mondiale de la santé).
  • pH trop haut (alcalin) : Favorise la précipitation du calcaire, l’entartrage des résistances de chauffe-eau, machines à laver, lave-vaisselle. Cela réduit leur efficacité énergétique et augmente leur risque de panne.

Sur la peau et le linge :

  • Une eau trop acide peut être irritante pour les peaux sensibles ou atopiques, en particulier chez les jeunes enfants ou les personnes âgées.
  • À l’inverse, une eau trop alcaline, chargée en calcaire, rend le linge rêche, ternit les couleurs, et peut provoquer des dépôts blanchâtres sur la vaisselle.

Une histoire de compatibilité avec les désinfectants

Le pH influe directement sur l’efficacité des désinfectants (chlore, ozone, etc.) dans l’eau. En dessous de pH 7, le chlore est très actif, mais trop acide, il devient corrosif. Au-dessus de pH 8, son pouvoir désinfectant chute rapidement. C’est une des raisons pour lesquelles les professionnels ajustent le pH avant de traiter l’eau.

Un point marquant : dans les piscines, on cherche systématiquement un pH entre 7,2 et 7,6 pour optimiser le pouvoir désinfectant du chlore (source : INRS). Un équilibre similaire est recherché dans l’eau potable.

Le pH de l’eau et la sécurité de votre foyer : métaux et contaminants

Un pH mal maîtrisé fragilise la « barrière » des canalisations anciennes contre la libération de métaux nocifs :

  • Dans les maisons anciennes, le plomb peut encore être présent dans les branchements (généralement posés avant 1949). L’eau légèrement acide peut dissoudre ce plomb, augmentant la quantité ingérée par l’utilisateur, avec des risques neurotoxiques, en particulier chez les jeunes enfants et les femmes enceintes (source : Agence nationale de sécurité sanitaire, ANSES).
  • Avec les canalisations en cuivre, c’est l’eau trop acide qui ronge progressivement les parois, d’où une coloration bleutée-verte autour des robinets et la possibilité d’un goût métallique.
À noter : les systèmes de canalisations modernes (PEHD, PER, multicouche) sont bien plus résistants, mais le pH reste à surveiller dans tout réseau ancien ou mixte.

Le pH et la microbiologie de l’eau

Le pH de l’eau a aussi un effet sur la prolifération de certains micro-organismes :

  • Nombre de bactéries pathogènes se développent davantage entre pH 5 à 9, mais une eau très acide (< 5) ou très basique (> 9) n’est pas compatible avec la consommation humaine.
  • Un pH bien ajusté rend plus efficace la désinfection (chloration, UV), élément fondamental de la sécurité sanitaire de l’eau du robinet (source : Eaufrance.fr).

Mesurer le pH de votre eau : comment faire chez soi ?

Même si l’eau de réseau est réglementée, il peut être utile de vérifier ponctuellement son pH à domicile, surtout dans certains cas :

  • Présence de canalisations anciennes (plomb, cuivre)
  • Eau ayant un goût, une couleur ou une odeur inhabituelle
  • Utilisation d’équipements sensibles (osmoseur domestique, adoucisseur, chauffe-eau thermodynamique, etc.)
Voici quelques solutions à portée de main :
  1. Bandelettes réactives : Peu coûteuses, disponibles en magasin de bricolage ou en pharmacie. Précises à 0,5 unité près. Pratique pour un contrôle rapide.
  2. Testeurs électroniques (pH-mètres) : Plus chers (20–60€) mais précis à 0,1 unité. Nécessitent un étalonnage régulier avec solutions de référence. Très utile pour ceux qui veulent suivre les variations du pH dans le temps.
  3. Analyse en laboratoire agréé : Indispensable si vous détectez des anomalies persistantes ou en cas d’alimentation par un puits domestique.
Pensez à prélever l’eau après 2-3 minutes d’écoulement afin d’obtenir un résultat fiable (évite l’influence de l’eau stagnante dans les tuyaux).

Cas concrets : Que faire si le pH de l’eau de votre robinet est trop bas ou trop haut ?

Que faire en cas de déséquilibre évident ? Voici des solutions concrètes :

Si le pH est trop bas (acide, < 6,5)

  • Contacter le distributeur local pour signaler le problème, surtout si l’eau de tous les voisins est touchée.
  • Vérifier la tuyauterie pour détecter d’éventuelles parties corrodées ou fuites.
  • Pensez à installer un filtre reminéralisant ou un neutraliseur de pH (généralement à base de calcite ou de silicate) en entrée du réseau de la maison, particulièrement si vous avez un puits ou une source personnelle.

Si le pH est trop haut (alcalin, > 8,5)

  • En présence de dépôts blanchâtres ou d’entartrage excessif, un adoucisseur ou un filtre anti-tartre peut aider, mais attention à ne pas déséquilibrer d’autres paramètres (dureté, sodium…)
  • Contactez la régie d’eau pour signaler un éventuel problème de traitement.
  • Pour l’eau de puits ou de forage : un traitement au gaz carbonique (CO2) peut acidifier l’eau en la ramenant vers la neutralité, mais cela nécessite une installation adaptée.

Le pH et les autres paramètres de l’eau : un équilibre à surveiller

Le pH n’est jamais isolé. Il interagit en permanence avec la dureté (calcaire), l’alcalinité (capacité à tamponner l’acidité), la conductivité, et la présence ou non de certains minéraux. Une eau très dure n’est pas toujours très alcaline… et inversement.

Par exemple, deux eaux au pH identique peuvent présenter un comportement totalement différent selon leur composition en calcium, magnésium ou bicarbonates. C’est pourquoi les solutions de traitement doivent toujours s’accompagner d’une évaluation globale de la qualité de l’eau.

À retenir pour un foyer serein

  • Le pH de l’eau du robinet, s’il reste dans les normes, protège les installations et la santé de toute la famille.
  • Des variations de pH, même modérées, peuvent être un indice d’autres déséquilibres (corrosion, présence de métaux, mauvais goût).
  • Surveiller de temps à autre son pH est un geste simple mais précieux, surtout en cas d’installation vieillissante ou d’utilisation d’appareils sensibles.
  • En cas de doute ou de résultats anormaux, solliciter l’avis d’un professionnel ou réaliser une analyse complète chez un laboratoire agréé garantit une réponse adaptée.

Pour aller plus loin, chaque foyer peut demander à sa mairie ou à son service d’eau le rapport annuel détaillé sur la qualité de l’eau distribuée, avec les derniers relevés du pH et des autres paramètres essentiels.

Comprendre et surveiller le pH, c'est un réflexe simple qui contribue à la santé, à la longévité de votre équipement, et à la tranquillité de votre vie domestique.

Sources :

  • Santé Publique France, Qualité de l’eau du robinet
  • Arrêté du 11 janvier 2007 relatif aux limites et références de qualité des eaux destinées à la consommation humaine
  • Organisation mondiale de la santé – Guidelines for Drinking-water Quality
  • Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) – Exposition au plomb
  • INRS – Chloration et désinfection de l’eau
  • Eaufrance.fr – Portail national d’information sur l’eau