L’influence de l’origine de l’eau sur sa qualité dans votre maison

Comprendre les sources principales de l’eau du robinet

Le réseau d’eau potable français puise sa ressource dans deux grands types de milieux naturels :

  • Les eaux souterraines (environ 62% de la production nationale – source : Ministère de la Transition Écologique) : elles proviennent des nappes phréatiques et des aquifères profonds.
  • Les eaux de surface (environ 38%) : elles regroupent rivières, lacs, barrages-réservoirs.

À voir : selon les régions, la proportion entre ces deux grandes origines varie fortement. Ainsi, l’Île-de-France s’approvisionne majoritairement en eau de surface, tandis que certaines régions du Sud-Ouest utilisent principalement des nappes souterraines comme celle de la Garonne ou la nappe de l’Albien en région parisienne (source : Eau de Paris).

Ce que l’origine géologique apporte à votre eau : minéraux, dureté et goût

La “carte d’identité minérale” de l’eau

Avant même d’arriver à votre robinet, l’eau a longuement voyagé à travers les sols, les roches, ou les lits de rivières, se chargeant au passage de minéraux dissous. La nature de ces terrains détermine la composition minérale de l'eau :

  • Les eaux issues de nappes calcaires ou de sols riches en carbonate de calcium (ex : Bassin Parisien) seront naturellement “dures”. Elles contiennent beaucoup de calcium et de magnésium. Ce sont les régions où l’on retrouve le plus de dépôts de calcaire sur les robinetteries et dans les appareils électroménagers.
  • Les eaux de granit, de schiste ou issues de sols acides (Bretagne, Massif Central) présentent généralement une dureté plus faible. L’eau y est plus “douce”, ce qui limite le dépôt de tartre.
  • Les eaux superficielles varient énormément selon la saison et le débit des rivières. Lors des crues, l’eau charie davantage de matières organiques et de particules fines. En période sèche, la concentration en certains minéraux peut augmenter.

Au niveau du goût, une eau très calcaire donne un aspect “lourde” ou “plate” en bouche, une eau très douce peut paraître fade, voire présenter un goût légèrement acide. Le chlore, employé en traitement, n’est pas forcément lié à l’origine mais souvent plus marqué avec les eaux de surface, car elles nécessitent des désinfections plus importantes.

Dureté de l’eau : l’exemple français

En France, la dureté de l’eau varie de moins de 5 °f (très douce, Bretagne, Corrèze) à plus de 35 °f (très dure, Nord, Île-de-France ; source : UFC-Que Choisir, Observatoire de l’eau). Ce n’est pas anodin : à Paris, l’eau puisée en profondeur affiche souvent une dureté supérieure à 30 °f, expliquant l’omniprésence du tartre sur les résistances des chauffe-eau !

Protection et vulnérabilité : l’origine de l’eau face aux pollutions

Un autre aspect clé : la vulnérabilité aux polluants. Les eaux de surface, exposées directement aux activités humaines, sont plus sensibles aux contaminations ponctuelles (ruissellements agricoles, rejets urbains). Les eaux souterraines bénéficient d’un “effet filtre” du sol et sont en général mieux protégées mais peuvent mettre du temps à se régénérer en cas de pollution.

  • Eaux de surface : sensibles aux pesticides, nitrates, phosphates, pathogènes, hydrocarbures, microplastiques… Le traitement en usine doit être renforcé lors des épisodes de contamination (source : Eaufrance, Synthèse 2023).
  • Eaux souterraines : concernées aussi par les nitrates (en zones agricoles intensives), les résidus de solvants chlorés, et des paramètres naturels comme l’arsenic dans certaines régions (Charente, Limousin – source : Santé Publique France).

À noter : si une eau souterraine peut tarder à “cicatriser” après pollution, elle offre en revanche une grande régularité de qualité au fil des saisons. Ce n’est pas toujours le cas des captages de surface, plus réactifs aux aléas climatiques.

Traitements en station : des ajustements selon la ressource

L’eau du robinet, quel que soit son point de captage, doit répondre à plus de 60 critères de potabilité fixés par la règlementation française et européenne (Décret du 20 décembre 2001). Pour atteindre ces normes, les stations adaptent leurs traitements :

  • Eau de surface : nécessite en général plusieurs étapes : dégrillage, coagulation-floculation (élimination des particules), filtration sur sable ou charbon actif, désinfection plus importante (chlore, ozone, UV).
  • Eau souterraine : peut exiger des traitements plus légers mais doit parfois être dénitrifiée, décarbonatée (adoucissement) ou subir une déferrisation (fer naturellement présent en excès dans certains aquifères).

Un cas d’école : la Seine, source de 55% de l’eau potable en Île-de-France, subit des traitements poussés pour contrer les pollutions variables et les fortes matières organiques. À l’inverse, l’eau de la nappe de la Vienne, à Limoges, arrive quasi brute dans les réseaux après simple aération et filtration car sa pureté naturelle est très élevée (source : SIAAP, Eau de Paris).

Impacts concrets de l’origine de l’eau sur la vie domestique

Dépôts de calcaire et entretien des équipements

Les zones desservies par des eaux “dures” voient leurs bouilloires, lave-linge et chauffe-eau s’entartrer rapidement : 1 mm de tartre sur une résistance fait grimper la consommation électrique de 10% d’un chauffe-eau (Source : ADEME). Vous l'aurez compris : l'origine calcaire de l’eau impose souvent l’utilisation régulère d’anticalcaire ou d’adoucisseurs, voire le détartrage régulier des installations.

Au contraire, dans les régions d’eaux douces, la corrosion peut être favorisée dans certains tuyaux s’il n’y a pas assez de minéraux pour protéger naturellement les métaux.

Goût, odeur, et autres “signatures” perceptibles

Les variations de goût, d’odeur ou même de couleur de l’eau au fil de l’année sont bien souvent liées à des changements dans la source d’approvisionnement ou à l'intensité des traitements (par exemple, un goût de chlore plus marqué lors des pics de températures ou des fortes pluies).

Notons que si vous observez une modification soudaine de votre eau (trouble, goût inhabituel), il peut s’agir d’un changement temporaire de captage ou d’un incident de traitement. Les bulletins de qualité municipaux, mis à disposition par votre fournisseur d’eau, permettent de se tenir informé.

L’origine de l’eau, un enjeu sanitaire et écologique

La connaissance de l’origine de son eau permet également d’anticiper certains risques pour la santé :

  • Dans les réseaux anciens (avant 1955), la migration du plomb peut être accentuée par des eaux très douces ou très acides (source : Anses, 2013).
  • Les eaux calcaires, par leur pH alcalin, freinent en revanche cette dissolution du plomb.

Sur le plan écologique, privilégier des captages protégés et bien gérés permet de limiter les traitements chimiques et d'offrir à tous une eau saine, durablement. En 2020, selon le Ministère de la Transition Écologique, 1 captage sur 4 restait menacé par des pollutions diffuses (nitrates, pesticides notamment), ce qui pose des défis majeurs pour l’avenir.

Comment connaître l’origine et la qualité de l’eau dans sa commune ?

  • Chaque commune publie un “bulletin d’analyse de l’eau” une fois par an, accessible en mairie ou sur le site du fournisseur (Veolia, Suez, Eau de Paris…).
  • Le site eaupotable.sante.gouv.fr recense les analyses et les origines (surface/souterraine) de l’eau distribuée partout en France.
  • Vous y retrouverez les paramètres réglementaires : dureté, pH, nitrates, parfois provenance géographique précise (nom de la nappe principale, du cours d’eau, etc.).

Ce type de lecture permet à chacun d’ajuster ses habitudes domestiques : utiliser ou non un adoucisseur, filtrer l’eau davantage, éviter le repassage avec une eau très dure...

Pour aller plus loin : s’adapter à sa ressource et protéger l’eau à la source

Mieux connaître l’origine de son eau, c’est agir au niveau individuel et collectif :

  • Adapter ses usages et entretenir ses équipements en fonction de la dureté et de la minéralité.
  • Privilégier des dispositifs de filtration adaptés si la qualité brute est fluctuante (charbon actif, osmose inverse dans certains cas spécifiques).
  • Participer ou s’informer sur les programmes locaux de préservation des captages, décisifs pour limiter pollutions et besoins en traitement.

L’origine de l’eau du robinet est la première clé de compréhension de sa qualité dans la maison, et oriente tous les choix, des appareils domestiques jusqu’aux gestes du quotidien. Rester curieux et vigilant face à cet élément fondamental, c’est donner à sa maison les fondations d’une eau douce, saine… et durable !